La réforme du RSA, un nouveau sujet explosif pour le gouvernement ? On fait le point

Aides Sociales Le gouvernement propose que pour recevoir le RSA, il faut faire 15 à 20 heures d'activités par semaine.

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La réforme des retraites n’est pas le seul sujet de conflit entre les syndicats et le gouvernement. Cette semaine, Élisabeth Borne va rencontrer les cinq principaux syndicats pour renouer le dialogue. Les syndicats ont l’intention de discuter de la réforme du Revenu de solidarité active (RSA). Le projet de loi « Plein emploi » que le gouvernement présentera prévoit un système pour inciter les bénéficiaires du RSA à suivre un parcours de formation de 15 à 20 heures par semaine. Ils ne seront pas obligés de travailler gratuitement ou de faire du bénévolat. Les bénéficiaires seront accompagnés pour retrouver un emploi, se former, découvrir des métiers ou reprendre simplement contact avec le monde du travail. L’expérimentation de la réforme a été lancée dans 18 départements le mois dernier. Le gouvernement prévoit de l’étendre progressivement pour la généraliser début 2027.

Critique de la réforme du RSA

Le gouvernement veut améliorer l’emploi des bénéficiaires du RSA avec cette réforme. En janvier 2022, la Cour des comptes a révélé qu’environ la moitié des bénéficiaires ne s’engagent pas à trouver un travail et que 17% d’entre eux ne reçoivent aucun suivi. Les sages ont également déclaré que seulement 34% des bénéficiaires sont sortis du RSA et ont trouvé un emploi sept ans plus tard. Parmi eux, seulement un tiers a un emploi stable.

Cependant, la réforme elle-même est fortement contestée. Dans une déclaration publiée ce lundi, les syndicats réitèrent leur opposition à la conditionnalité d’accès au RSA, qu’ils qualifient de régression sociale. De nombreuses associations de défense des plus précaires et des personnalités de gauche ont également exprimé leur désaccord.

Ces réactions ont été analysées par le sociologue François-Xavier Merrien, qui a mené des études auprès des bénéficiaires du RSA dans le Gers et en Bourgogne : « Cette réforme insinue que les bénéficiaires sont des pauvres qui ont choisi de vivre des aides sociales, alors qu’il s’agit souvent de personnes peu qualifiées qui alternent entre les périodes de travail (avec des emplois précaires) et de chômage, ou de personnes qui ont connu un accident de la vie, comme un licenciement économique, un problème de santé ou une rupture conjugale. »

Les propos de Macron sur les personnes bénéficiant du RSA ont été critiqués

Lors de son interview sur TF1 et France 2 fin mars, Emmanuel Macron a opposé les personnes travaillant aux personnes bénéficiant de minima sociaux. Il a affirmé : « Beaucoup de personnes travaillant disent : ‘vous nous demandez des efforts (mais) il y a des personnes qui ne travaillent jamais' ». Cette déclaration a suscité des réactions négatives de la part des associations luttant contre la précarité. François-Xavier Merrien pense que c’est un discours populiste qui vise à créer une alliance avec une partie des classes moyennes.

Selon Benoit Reboul-Salze, délégué national ATD Quart-monde, une stigmatisation accrue des bénéficiaires du RSA pourrait avoir des conséquences en cascade : « Cette réforme risque aussi de dissuader certaines personnes de demander le RSA. Ce qui augmenterait encore le taux de non-recours à cette aide, qui est de 34 %. » Cela pourrait entraîner une augmentation du nombre de personnes en situation de grande précarité.

Des mesures strictes

Une mesure critiquée concerne la suspension temporaire, totale ou partielle du RSA si le bénéficiaire refuse sans raison valable de signer son contrat d’engagement. Cette mesure est critiquée par Benoit Reboul-Salze qui pense qu’elle risque de stigmatiser les bénéficiaires et de les décourager dans leur recherche d’emploi. L’Union nationale des centres communaux d’action sociale (Unccas) partage cet avis.

La faisabilité de cette réforme est également remise en question. Les expérimentations ne seront pas terminées avant décembre 2023, alors que le gouvernement souhaite présenter son projet de loi dès le mois de juin. Il est également difficile de trouver les moyens nécessaires à cette réforme, comme le recrutement de nombreux conseillers pour inscrire les bénéficiaires à France Travail et leur proposer un suivi personnalisé.

Proposer 15 à 20 heures d’activité à 2 millions de personnes semble également complexe, car cela représenterait 30 millions d’heures d’activité par semaine à trouver. La possibilité pour chaque bénéficiaire d’honorer ses rendez-vous avec son conseiller est également difficile pour ceux qui habitent à la campagne sans moyen de transport, ou pour ceux qui ne peuvent pas faire garder leurs enfants.

Malgré le risque de frictions avec les syndicats et les associations caritatives, cette réforme ne devrait pas entraîner de grandes manifestations, car elle ne touche qu’une petite frange de la population. François-Xavier Merrien le précise en anticipant les réactions à cette réforme par rapport aux manifestations des retraites.