Rupture conventionnelle avant la retraite : une mesure qui pourrait avoir l’effet inverse

La réforme des retraites prévoit d'augmenter les coûts des ruptures conventionnelles pour empêcher les entreprises de licencier leurs employés âgés juste avant la retraite. Certains experts pensent que cette mesure pourrait avoir l'effet inverse.

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Le gouvernement a proposé une nouvelle mesure pour encourager les entreprises à garder leurs travailleurs seniors en utilisant une incitation fiscale. En vertu de la réforme des retraites, les taux de cotisations patronales sur les indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite seront harmonisés à partir du 1er septembre 2023. Les détails de cette mesure incluent l’augmentation du forfait social de 20% à 30% appliqué à la part exonérée de cotisations sociales de l’indemnité de rupture conventionnelle (jusqu’à 87 984 euros d’indemnité), ainsi que l’abaissement de la contribution patronale de 50% à 30% sur celle de l’indemnité de mise à la retraite.

Cette mesure vise à encourager les entreprises à maintenir leurs employés jusqu’à l’âge de 70 ans. Cependant, elle a plusieurs limites. D’abord, la hausse des cotisations patronales sur les ruptures conventionnelles est négligeable par rapport à son coût global. Selon les données mises à disposition par la Dares, le service de statistiques du ministère du Travail, l’indemnité médiane de rupture conventionnelle en 2021 était de 1 465 euros brut. Cela signifie que la moitié des salariés ont touché moins que cette somme et l’autre, plus.

Pour les ruptures conventionnelles conclues avec des salariés ayant peu d’ancienneté, conduisant donc à de plus petites indemnités, l’impact de la hausse du forfait social sera quasi neutre.

Recherche de solutions plutôt que refus de rupture conventionnelle

En réalité, un employeur peut hésiter à proposer une rupture conventionnelle à un employé qui a travaillé longtemps dans l’entreprise. Mais la surtaxe à partir du 1er septembre 2023 ne décourage pas les employeurs d’opter pour cette solution, même pour les salariés les plus expérimentés. Elle les incite plutôt à négocier des contreparties, comme demander à l’employé de rester plus longtemps dans l’entreprise en échange de la rupture conventionnelle. D’ailleurs, l’expérience montre que lorsque la loi de financement de la Sécurité sociale de 2013 a instauré un forfait social de 20 %, cela n’a pas freiné l’usage de la rupture conventionnelle. En 2022, plus de 500 000 ruptures conventionnelles ont été conclues, contre 300 000 en 2013. Et le passage à 30 % ne va pas changer la donne.

Pour l’employeur, la rupture conventionnelle est plus sécurisante juridiquement que la mise à la retraite et évite les dommages et intérêts en cas de contestation du salarié. De plus, avec la mise à la retraite, le salarié doit respecter un préavis, ce qui n’est pas le cas avec la rupture conventionnelle. Toutefois, l’employeur doit être vigilant et respecter les règles de transparence pour que la rupture conventionnelle soit bien volontaire et légale.

Retraites: coût des ruptures conventionnelles avec les seniors abaissé.

Cet article concerne une réforme des retraites qui pourrait avoir des impacts non désirés. L’objectif de cette réforme est de favoriser le maintien des seniors en activité, mais elle pourrait avoir l’effet contraire en encourageant les employeurs à recourir davantage aux ruptures conventionnelles pour se séparer de leurs salariés âgés.

En effet, actuellement, les indemnités perçues par les salariés ayant droit à une pension de retraite sont soumises à toutes les cotisations sociales. Cela rend plus coûteux pour les employeurs de conclure une rupture conventionnelle avec un salarié qui peut prendre sa retraite. Toutefois, à partir du 1er septembre 2023, les taux de contribution sociale de l’employeur seront harmonisés à 30 %. Cette mesure rendra l’opération moins coûteuse pour les entreprises. Cela pourrait encourager les employeurs à utiliser davantage les ruptures conventionnelles pour se séparer de leurs salariés seniors.

Cependant, il est important de noter que les salariés âgés ont souvent une grande expérience et une expertise précieuse pour l’entreprise. Il est donc essentiel de trouver des moyens de les retenir plutôt que de les pousser vers la sortie. Les employeurs pourraient envisager des mesures incitatives pour encourager les salariés seniors à rester en activité, comme des formations pour acquérir de nouvelles compétences ou des horaires de travail plus flexibles.

En fin de compte, il est important de trouver un équilibre entre les besoins des employeurs et ceux des salariés seniors. La réforme des retraites doit être mise en œuvre de manière réfléchie et avec un souci de justice pour tous les travailleurs.