Espace : Pourquoi est-il si complexe d’atterrir sur la Lune ?

La société américaine Intuitive Machines espère que son robot se posera sur la lune ce jeudi. Ceci vient après plusieurs essais ratés ces derniers mois.

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Intuitive Machines, une entreprise pionnière basée aux États-Unis, se prépare à faire un essai historique en tentant de faire atterrir son appareil sophistiqué, Nova-C, sur la surface lunaire le jeudi 22 février. Emportant avec lui six instruments scientifiques de pointe conçus par la NASA, l’appareil se dirige vers le pôle Sud de la Lune, une région d’un intérêt scientifique considérable. Si cette mission ambitieuse réussit, cela marquerait une avancée majeure pour les États-Unis, car ce serait leur premier atterrissage réussi sur la Lune depuis 1972. En plus de cela, Intuitive Machines joue également un rôle crucial dans le programme Artemis de la NASA, une initiative ambitieuse visant à établir une présence humaine durable sur la Lune.

Récemment, un certain nombre de missions spatiales lancées par différents pays ont tenté de réaliser l’exploit d’atterrir sur la Lune, mais elles se sont malheureusement soldées par des échecs. Toutefois, l’agence spatiale japonaise, JAXA, a connu un succès modeste en janvier : elle a réussi à faire atterrir son appareil, Slim, sur la Lune. Cependant, Slim a rencontré des problèmes après l’atterrissage, ses batteries sont presque épuisées et il est maintenant en mode veille. « Atterrir sur la Lune est une tâche extrêmement difficile », a déclaré un représentant de l’Institut japonais des sciences spatiales et astronautiques. De son côté, Steve Altemus, le PDG d’Intuitive Machines, reconnaît qu’il « est pleinement conscient des défis considérables qui l’attendent ». Franceinfo a publié un article détaillé expliquant pourquoi l’atterrissage sur la Lune est une entreprise si complexe.

La Lune n’a pas d’atmosphère

La Terre, notre planète natale, est d’une taille imposante et pour la quitter, il est nécessaire de se déplacer à une vitesse considérable. Si l’on envisage un voyage jusqu’à la Lune, notre satellite naturel, on doit également maintenir une vitesse très élevée. Cependant, une fois que l’on approche de la Lune, il est impératif de ralentir considérablement afin d’atterrir en douceur et en toute sécurité.

Sur la Terre, nous avons la possibilité d’utiliser des parachutes pour ralentir notre descente et faciliter un atterrissage en douceur. Cependant, la Lune, étant dépourvue d’atmosphère, rend l’utilisation de parachutes inefficace.

Ainsi, pour ralentir suffisamment lors de l’approche de la Lune, on doit allumer les moteurs de la navette spatiale. Cela revient à effectuer une poussée dans la direction opposée à celle de notre trajectoire. Cette manoeuvre est extrêmement délicate à réaliser car elle nécessite un contrôle parfait de tous les paramètres impliqués. C’est pour cette raison que l’atterrissage sur la Lune est considéré comme une tâche extrêmement complexe et difficile à accomplir.

Il n’y a pas de système de géolocalisation

Bien que nous ayons réussi à cartographier la surface de la Lune avec une précision remarquable, il reste incroyablement difficile de naviguer précisément dans cet environnement extraterrestre. Contrairement à la Terre, la Lune ne possède pas de système de géolocalisation, ce qui complique grandement les choses. Les engins spatiaux qui réussissent à atterrir sur la surface lunaire doivent prendre des photographies et les comparer avec des images existantes pour déterminer leur position exacte, comme l’explique Jean Blouvac du Centre national des études spatiales (Cnes).

Dans un avenir où nous pourrions envisager la construction d’une colonie permanente sur la Lune, il est possible que nous développions un système de géolocalisation lunaire. Cependant, pour l’heure, ce n’est qu’une idée exploratoire, comme l’indique l’entreprise Astrobotic dans un communiqué publié en décembre 2023.

La réalité actuelle est remplie d’incertitudes. Sur Terre, le système GPS Galiléo offre une précision jusqu’à un mètre. Malheureusement, sur la Lune, la précision est nettement inférieure. Par exemple, les Japonais ont réussi à faire atterrir leur module Slim avec une précision de 55 mètres, ce qui est considéré comme une prouesse exceptionnelle dans le contexte lunaire.

L’endroit exact d’un atterrissage sur la Lune est d’une importance cruciale pour la sécurité de la mission. La surface lunaire est jonchée de reliefs, de cratères, de rochers et de pentes qui peuvent rendre l’atterrissage extrêmement périlleux. Il est également essentiel de connaître avec précision l’altitude pendant la descente, c’est pourquoi les engins sont équipés de radars dédiés. Une imprécision de seulement 3 mètres peut être fatale, déclare Sylvestre Maurice. Dans cette entreprise, on n’a droit qu’à une seule tentative.

Pilotage à (très grande) distance

La Lune, même si elle est considérée comme notre voisine la plus proche dans le vaste univers, la galaxie ou le système solaire, est à une distance non négligeable d’environ 384 000 km de la Terre.

Un délai d’une seconde peut sembler insignifiant dans la vie quotidienne, mais il porte une importance cruciale lorsqu’on se déplace à des vitesses élevées, comme c’est le cas lorsqu’on atterrit sur la Lune. C’est la raison pour laquelle la dernière partie de la descente vers la Lune est automatisée. Comme le souligne Jean Blouvac, ces phases automatisées de descente commencent généralement lorsqu’on est encore à une centaine de kilomètres de la surface lunaire, dans une zone qu’on appelle l’orbite basse lunaire.

Durant cette phase d’atterrissage, les systèmes de navigation spatiale utilisent un signal radar sophistiqué pour connaître précisément leur hauteur par rapport à la surface lunaire et ajuster leur vitesse en conséquence pour un atterrissage en douceur. En outre, il précise que certaines parties de la Lune présentent des anomalies locales du champ de gravité, ce qui complique davantage la tâche. Jean Blouvac, qui exerce son expertise au sein de l’agence spatiale française Cnes, parle de ces anomalies comme de « difficultés supplémentaires », qui augmentent la complexité des missions lunaires. Au final, environ la moitié des missions lunaires se terminent malheureusement en crash, soulignant la difficulté et le défi que représente un atterrissage sur la Lune.