Prix de l’électricité en hausse : 15% en février, 10% en août et c’est loin d’être fini

La hausse inattendue du prix réglementé de l'électricité au 1er août n'est pas surprenante et d'autres hausses sont prévues dans les années à venir.

© Stéphanie Bascou

En juillet, une annonce a surpris beaucoup de gens. En effet, le prix réglementé de l’électricité allait augmenter de 10% le 1er août. Le gouvernement avait dit que la hausse de février serait la seule de l’année 2023. Mais comme souvent malheureusement, les promesses ne sont pas toujours tenues.

Finalement, le gouvernement n’a pas su protéger les Français des hausses de prix. Les consommateurs doivent donc payer plus pour leur électricité. Pour comprendre pourquoi les prix augmentent, il faut se souvenir de deux choses importantes : la politique européenne en matière d’énergie et l’impact des crises sur cette politique.

La concurrence au service du consommateur (électricité)

La politique européenne en matière d’énergie vise à instaurer un marché unique réglementé par la concurrence. Cependant, les pays européens ont des ressources et des politiques énergétiques différentes. Les crises ont compliqué la réforme du marché de l’électricité et le tarif réglementé peut sembler dépassé dans le cadre d’une concurrence libre. Bien que le tarif réglementé du gaz ait été supprimé, celui de l’électricité est maintenu pour protéger les consommateurs. Cependant, EDF et les entreprises locales de distribution peuvent proposer d’autres tarifs pour rivaliser avec les concurrents. Selon la Commission de régulation de l’énergie, la majorité des particuliers et des entreprises ont choisi le tarif réglementé. Et ce, malgré l’ouverture à la concurrence et la hausse des tarifs touche de nombreux consommateurs.

Augmentation des prix de l’électricité en France en 2021 et 2022

En 2020, les prix de l’électricité ont commencé à augmenter en Europe. Et ce, après les confinements à cause de la pandémie de Covid-19, en raison d’une forte demande. En France, le prix moyen était de 32,4 euros à la fin de 2020.

Cependant, en 2021, les prix ont considérablement augmenté, avec un prix moyen de 345,3 euros en France vers la fin de l’année. Cette augmentation est due à l’arrêt des livraisons de gaz russe et à la guerre en Ukraine en 2022. En août, le prix a atteint un record de 611,6 euros pendant une semaine.

RTE, la filiale d’EDF et gestionnaire du réseau de transport d’électricité, a dû faire face à une forte demande. Atteignant ainsi un record de 2 880 euros le MWh à 9 heures du matin un jour. Le gouvernement a décidé d’augmenter le prix de l’électricité de 10% pendant l’été 2022 pour répondre à la hausse des prix sur le marché de gros de l’électricité.

La seule chose inattendue était l’augmentation de 10% des tarifs de l’électricité en août, décidée par le gouvernement.

Les prix sur les marchés ont augmenté. Ce qui a ainsi rendu difficile le maintien du tarif réglementé par le gouvernement français et d’autres gouvernements. En 2022, le tarif réglementé n’a augmenté que de 4 %. Or, en février 2023, une hausse plus importante de 15 % a été décidée. Si les fournisseurs d’électricité ne peuvent pas augmenter leurs prix en réponse à une augmentation des coûts, ils risquent de faire faillite. Le bouclier tarifaire, qui est une intervention de l’État pour aider les consommateurs à payer moins cher, est financé par les contribuables. En 2022, il a coûté 24 milliards d’euros et pourrait coûter 17 milliards d’euros en 2023.

La Commission de régulation de l’énergie propose des augmentations de tarifs réglementés chaque semestre, basées sur les coûts d’approvisionnement, d’acheminement, de commercialisation et de rémunération de la fourniture d’électricité. En juin 2023, elle a proposé une augmentation de 74,5 % du tarif réglementé TTC, mais cela était politiquement impossible, donc une augmentation de 15 % a été décidée. En août, une augmentation de 10 % a été décidée, ce qui était une surprise étant donné que les prix de marché avaient baissé.

Les entreprises productrices d’électricité, notamment EDF, devront faire de grosses dépenses dans les années à venir.

Le gouvernement a remarqué que les prix ont augmenté de 4,3 % en juillet, ce qui est moins que les 6,3 % en février. C’est encore plus élevé que ce que les autorités monétaires souhaitent (2 % maximum en tendance), mais c’est plus supportable, surtout avec les salaires également en hausse (4,6 % sur un an pour le salaire mensuel de base des salariés). La hausse des tarifs de l’électricité pendant les vacances devrait être tolérable.

Pour atteindre l’objectif d’un déficit public inférieur à 5 % en 2023 et revenir en dessous de 3 % en 2027, comme la France s’y est engagée dans son programme de stabilité 2023-2027, le gouvernement doit réduire les dépenses de l’État. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a déclaré à plusieurs reprises que l’on arrive à la fin du « quoi qu’il en coûte ». Il devrait tenir cette promesse.

La hausse de la tarification de l’électricité non prévue laisse-t-elle présager d’autres augmentations ? Le rythme actuel ne peut pas continuer : 15 % en février, 10 % en août, c’est violent, même si les calculs de la CRE montrent qu’en pure logique économique, il faudrait aller encore plus vite.

L’électricité est un sujet sensible pour les ménages aux revenus modestes

Cependant, il est clair que la tendance va rester durablement à une hausse plus rapide que l’ensemble des prix. Quand on voit la liste des coûts que la CRE prend en compte, il est difficile d’imaginer qu’il puisse en être autrement.

Les producteurs d’électricité, EDF en premier, vont devoir investir massivement dans les prochaines années. En effet, il va falloir procéder au « grand carénage » des centrales nucléaires actuellement en fonctionnement. C’est-à-dire aux grands travaux d’entretien permettant de prolonger leur durée de vie.

Il faudra également construire au moins six EPR 2. Ces réacteurs EPR de nouvelle génération dont on espère qu’ils seront moins longs à construire et moins coûteux. Cette nécessité de nouveaux investissements dans le nucléaire est vivement contestée dans les milieux écologistes. Mais il semble difficile d’en faire l’économie si l’on place réellement la décarbonation de la production d’énergie en haut de la liste des priorités.

Nous devons encourager de manière impérative les politiques qui encouragent la sobriété et l’efficacité énergétique (électricité).

Pour attirer des investisseurs privés, il est important que le prix de l’énergie soit rentable pour eux. Cela signifie donc qu’il faut investir dans les énergies renouvelables et moderniser le réseau électrique. RTE prévoit alors d’investir 33 milliards d’euros pour moderniser le réseau d’ici 2035, soit 2,2 milliards d’euros par an. Cela ne représente effectivement qu’une petite partie des 150 à 200 milliards d’euros nécessaires pour moderniser l’ensemble du système électrique. Néanmoins, cela contribue également à augmenter les coûts.

RTE travaille sur des scénarios pour réduire les émissions de carbone, avec des chiffres oscillant entre 580 et 640 TWh d’ici 2035. Les énergies renouvelables ont des coûts variables beaucoup plus faibles que les énergies fossiles ou le nucléaire. Pourtant, il ne faut pas oublier les coûts de recherche et développement. Mais aussi de construction des installations et des infrastructures de transport. Il est probable que les tarifs augmentent en conséquence.

Dans ce contexte, il est important de continuer à encourager les politiques d’économie d’énergie. Ainsi que d’aider les personnes les plus défavorisées. Les tarifs pourraient évoluer en fonction de la quantité d’énergie consommée. Il est important de comprendre que l’énergie, même si elle est qualifiée d’« verte », a un coût économique et environnemental.