Si vous avez déjà vomi une huître, voici pourquoi vous ne pourrez peut-être plus jamais en remanger

L'huître est votre péché mignon, mais du jour au lendemain, vous en avez vomi ? Il s'agit d'une allergie soudaine rare, mais pas impossible.

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Si vous adorez l’iode et que vous avez besoin de votre petite dose régulièrement, la période de fin d’année doit être votre préférée. En effet, les fruits de mer sont les mets phares du moment, et notamment les huîtres. La mauvaise nouvelle, c’est que vous pouvez être victime d’une allergie foudroyante du jour au lendemain. Les allergologues nomment ce phénomène le SEIPA. Il y a beaucoup de personnes qui contractent cette allergie inattendue et particulièrement en ce qui concerne l’huître… On vous explique !

Allergie soudaine à l’huître ? Rare, mais peut survenir à tout moment

Une fois que tu as vomi une huître c’est fichu, tu ne peux plus jamais en manger” : vous avez forcément déjà entendu cet adage. Alors, une rumeur ou une réalité ? En effet, cette allergie à ce fruit de mer est rare, mais elle existe et frappe sans prévenir“Le SEIPA, c’est le syndrome d’entérocolite (inflammation intestinale, ndlr) induit par les protéines alimentaires”, explique l’allergologue Madeleine Epstein, pour Sciences et Avenir. Le syndrome est plus connu chez le nourrisson qui fait une réaction allergique aux protéines de lait de vache. C’est aussi possible pour les œufs ou encore les poissons. “Le SEIPA le plus fréquent chez les adultes est déclenché par les huîtres, au point que les allergologues se demandent dans quelle mesure l’ensemble des toxi-infections attribuées aux huîtres seraient en réalité des SEIPA”, poursuit Madeleine Epstein.

Peu de données chiffrées sur l’allergie à l’huître

Au niveau international, une étude révèle que 0,22% la proportion d’adultes sont victimes de SEIPA (toutes protéines alimentaires confondues) contre 0,55% pour les bébés aux États-Unis. En France, le Dr Epstein a mené l’enquête et seulement 38 cas de SEIPA aux huîtres sur l’année 2019 ont été repérés. « Un nombre largement sous-estimé« , souligne la spécialiste. En effet, si les ne se déclarent pas, ils ne rentrent pas dans les statistiques. Pour information, les personnes concernées sont souvent des femmes qui ont environ 40 ans. Une étude canadienne datant de 2020 a conclu la même chose : 68% de femmes ont eu un SEIPA adulte.

En tout cas, les chiffres sont rares pour les adultes. En effet, les chercheurs ont plus d’informations pour les bébés, car ils consultent des pédiatres. “Les huîtres sont un plat occasionnel, donc l’allergie est rapidement identifiée, et après un deuxième épisode la plupart des adultes cessent tout simplement d’en manger sans consulter”, précise Madeleine Epstein.

Est-ce qu’il s’agit d’un SEIPA ou pas ?

Si vous avez fait une allergie plusieurs fois, c’est sûrement un SEIPA. “Beaucoup de gens malades une première fois pensent être simplement tombés sur une huître infectée et qu’ils peuvent donc en remanger. Mais à chaque fois ils sont malades”, explique l’expert en allergie. Les symptômes du syndrome sont au niveau de la digestion. Vous pouvez avoir des vomissements et des diarrhées deux heures après la consommation. “Statistiquement y a très peu de chance que vous tombiez deux fois de suite sur une huitre infectée”, continue-t-elle.

Le côté vicieux du SEIPA, c’est qu’il survient comme ça, du jour au lendemain, sans élément déclencheur. “On n’en sait rien”, avoue Madeleine Epstein. “Une gastro-entérite peut par exemple modifier votre muqueuse digestive et révéler une intolérance latente. C’est toujours une accumulation de facteurs, mais on ne les connaît pas tous et on ne sait donc pas comment les réguler.”

Une réaction incomprise

Quand vous avez une allergie de base, l’aliment entraîne une production d’anticorps nommés IgE. Quand vous faites des tests d’allergie, ce sont ces fameux IgE qui valident votre allergie. Pourtant, dans le cadre du SEIPA, il n’y a rien. Les “vraies” allergies aux huîtres ou fruits de mer, avec IgE, sont “très rares”, informe Madeleine Epstein. Ainsi, les spécialistes pensent plutôt à un déséquilibre du microbiote intestinal et aussi à une réaction du système immunitaire. « C’est une réaction à médiation cellulaire via les lymphocytes T (par opposition à la réaction par IgE, qui est dite humorale et non cellulaire, ndlr), mais on ne connaît pas le mécanisme précis”, termine le docteur. En d’autres termes, le SEIPA n’a pas de réels marqueurs, mais il est confirmé par “exclusion” des autres causes, et notamment en l’absence d’IgE.

La guérison n’est pas assurée

Le nourrisson guérit dans les deux ans qui suivent. Mais, pour l’adulte, ce n’est pas le cas. Cela peut durer des années. Le seul moyen de savoir si on est encore victime du SEIPA, c’est de consommer l’aliment en question. “Mais je ne peux pas vous le conseiller”, admet Madeleine Epstein. “La seule recommandation, c’est l’éviction de l’aliment.”

Nous avons peut-être une bonne nouvelle pour terminer cet article. Si l’huître crue n’est plus possible, l’huître cuite pourrait passer. Encore une fois, cela dépend de la protéine qui vous provoque l’allergie et on ne peut pas l’affirmer avant d’avoir testé !