Réforme des retraites : l’angle mort de la fonction publique

Dans la réforme des retraites, on évoque la suppression des régimes spéciaux des fonctionnaires, avantageuse comparée au privé... Explications !

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Tout savoir sur la retraite des fonctionnaires !

La réforme des retraites fait couler beaucoup d’encre et est loin de faire l’unanimité. Ce n’est pas pour rien que les mobilisations et les grèves se multiplient. Personne n’est oublié et, dans cette dernière, on évoque la retraite des fonctionnaires. Est-ce grave docteur ? On comprend vite que l’équité entre le public et le privé n’est pas le sujet prioritaire du gouvernement !

D’ailleurs, ce dernier a bien préparé son coup en réalisant plusieurs rapports de défense (Conseil d’orientation des retraites, Dress, etc.). Au moment de la présentation de la réforme des retraites, l’exécutif tentait d’expliquer que la retraite des fonctionnaires n’est pas plus avantageuse que celle du privé. Peut-on le croire ? La réponse ci-dessous !

Un mode de calcul avantageux pour les agents publics

La retraite des fonctionnaires a l’avantage d’avoir un mode de calcul différent et très avantageux. En effet, la pension se base sur les salaires des six derniers mois de la carrière. Donc, quand ces derniers sont les plus élevés. À l’inverse, dans le privé, le calcul de la pension se base sur toute la carrière, notamment les 25 meilleures années pour le régime de base (pas au-delà de 50 % du plafond de la Sécu).

Pour qu’on accepte cette idée qui nous parait injuste, l’administration explique que les primes et indemnités reçues pendant la carrière des fonctionnaires ne rentrent pas dans le calcul. Ainsi, le mode de calcul de la retraite des fonctionnaires est plus intéressant afin de contrebalancer le fait que les primes ne sont pas prises en compte, comme c’est le cas dans le privé. En somme, le gouvernement essaye de créer une équivalence entre le public et le privé. La réalité est quelque peu différente…

Intégration des primes et indemnités dans le calcul des pensions

Mais, il faut savoir que ça fait des années que les syndicats de fonctionnaires œuvrent pour intégrer les primes dans le mode de calcul. Ils ont réussi pour plusieurs d’entre elles. Par exemple, l‘indemnité de sujétions spéciales (ISS) est une indemnité donnée aux fonctionnaires pour les contraintes et risques encourus pendant leur carrière. Dans les années 80, cette dernière a été prise en compte pour la retraite des fonctionnaires, tels que les policiers en catégorie « active », les gendarmes et aussi le personnel de prison.

Depuis 1990, d’autres primes ont été intégrées, comme celle des risques des douaniers, du feu des pompiers, mais aussi la bonification indiciaire. Cette dernière est appelée NBI (nouvelle bonification indiciaire) et concerne des points d’indice et un complément de rémunération.

Retraite des fonctionnaires : le NBI et la Préfon-retraite

De plus, certaines indemnités ont été données aux fonctionnaires et réévaluées à la hausse dans certains cas, pour qu’ils cotisent sans diminution de salaires à la Préfon. Un régime de retraite complémentaire facultatif par capitalisation.

La prime NBI (nouvelle bonification indiciaire) est le parfait exemple. Cette dernière est versée aux aiguilleurs du ciel. Ces derniers ont commencé à la percevoir justement pour cotiser à la Préfon, mais elle donne un droit supplémentaire à la retraite, en plus des droits classiques du régime de retraite des fonctionnaires.

Les aiguilleurs furent les premiers à en profiter dans les années 90, mais ce ne sont, aujourd’hui, plus les seuls. La prime s’est nettement élargie.

Les agents publics qui ne touchent pas de NBI ne sont pas à plaindre, car ils perçoivent d’autres indemnités et d’autres droits spécifiques. On peut citer l’indemnité mensuelle de technicité (IMT) des agents des impôts ou la prime spéciale de sujétion des aides-soignants de l’hôpital public.

Un « transfert prime/point »

De plus, la loi de finances de 2016 a mis en place pour la retraite des fonctionnaires un « transfert prime/point ». Une mesure qui diminue petit à petit les sommes des primes des agents publics, mais en contrepartie, ils reçoivent une hausse équivalente des grilles indiciaires. En bref, ils reçoivent autant de salaires, mais plus de retraites.

Cette retraite complémentaire par capitalisation qui concerne les primes des fonctionnaires date de la réforme Fillon en 2003. En somme, les agents publics cotisent sur leurs indemnités 5% et l’État ajoute aussi sa participation au même niveau de pourcentage pour complémenter la retraite des fonctionnaires.

À savoir, cette intégration est limitée à 20 % du traitement indiciaire. Pour la plupart des agents publics, cela signifie une intégration totale. En effet, les indemnités correspondent à peu près à 20 et 22 %. Au début de sa mise en place, les montants n’étaient pas élevés, mais le régime a évolué.

Au bout de 20 ans, le système représente 40 milliards d’euros et continue sa course.

Promotion éclair et booster d’échelons

Mais, bien avant toutes ces nouvelles mesures, l’administration avait déjà réglé le problème de la non-intégration des primes. Elle utilisait la technique courante du « coup de chapeau ». Il s’agit de donner une promotion éclair aux fonctionnaires pour augmenter ses échelons en fin de vie professionnelle.

Ainsi, c’est aussi une augmentation conséquente du montant de la retraite des fonctionnaires, puisque le système tient compte des six derniers mois de salaire. Avec cette pratique, l’agent public peut toucher une pension équivalente à ses dernières rémunérations.

La Cour des comptes n’approuve pas, mais ne semble pas contrôler non plus… Donc, même si le système ne prend pas en compte les primes, les fonctionnaires reçoivent des compensations très attractives. Et, les syndicats ne vont pas s’arrêter en si bon chemin. Avec la réforme des retraites actuelle, ils en demandent encore ! Affaire à suivre !